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Évolution du Var et érosion du littoral

 

Etude des facteurs responsables de l’érosion du littoral

Par M. Jacques DUCLOS, géographe,

ancien Président Directeur Général de DECCA SURVEY FRANCE

 

 

Petite Histoire du Var

"Je m’appelle VAR, je suis un fleuve côtier torrentiel de 106 Kms, né à environ  1800 mètres d’altitude. Les quatre cinquième de mon cours se déroulent dans des gorges de différentes natures rocailleuses. Grossi de nombreux petits affluents, j’arrive dans une vallée s’élargissant progressivement jusqu’à la mer ; c’est là, que les Hommes ont commencé à me causer des soucis.

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L’on commença par construire une digue sur ma rive gauche : cela avait un but louable, celui d’augmenter la surface cultivable déficitaire de la région. La  réussite de cette première expérience entraîna nos humains à faire l’équivalent sur ma rive droite.

L’augmentation de la population fit qu’on n’hésita pas à prélever dans mon lit, le tout-venant nécessaire à la réalisation de ce nouvel urbanisme. Ces prélèvements devenant de plus en plus importants, entraînèrent à la fois, une modification conséquente de mon cours et une dégradation du pied des digues qu’il fallut renforcer périodiquement.

 

C’est à partir de là que commencèrent les vrais ennuis.

 

Grâce aux résultats positifs de ces premiers endiguements, il fut décidé de poursuivre la réduction de mon  lit. Pour cela, on fit appel à différents techniciens qui me mesurèrent en X. Y. et Z ainsi qu’en débit ; cela leur permirent de construire ma maquette exacte ou presque, afin d’en définir la largeur minimum nécessaire au passage de mes crues. C’est ainsi que nos grosses têtes réussirent, contre toute logique, à réduire en 6 Kms, la largeur de mon lit, de 300 mètres à 175 mètres, ce qui, à ma connaissance, n’a jamais été réalisé à l’embouchure d’autres fleuves...Bien sûr, des ha de terrains furent récupérés, non pas pour faire pousser des légumes, peu rentables, mais pour y implanter des industries, des supermarchés ou toute autre activité.

 

Tout cela commençait à m’horripiler sérieusement et je devais réagir.

 

D’abord, afin d’arrêter l’énorme quantité de matériaux que l’on me prélevait, je décidais d’abaisser le niveau de leur nappe phréatique. Afin de relever celle-ci, ils réagirent violemment en barrant mon cours par des petits ouvrages qu’ils baptisèrent seuils. Ceux-ci remplirent bien leur office durant un certain temps ; celui qu’il me fallut pour combler de fins sédiments, ces petites retenues.

 

Malheureusement, une fois comblés, ces ouvrages devinrent des tremplins facilitant mon passage par-dessus les digues ; ce que je fis plusieurs fois (pour me venger).

 

Avant le XXème siècle, mon cours qui n’avait pas encore subit les idées saugrenues des hommes, s’étalait librement à son arrivée en mer, entre  Ferber et Cros de Cagnes.Durant plusieurs millénaires, mes eaux turbides déposèrent leurs sédiments dans cet espace, créant ainsi, ce que l’on appelle aujourd’hui un Delta."

 

 

Conséquences sur l'érosion du littoral 

"Le VAR  nous ayant raconté  tous ses  petits malheurs, voyons les problèmes que ceux-ci engendrèrent sur notre littoral.

 

Tout d’abord, ce grand plateau naturel qui n’était plus alimenté en sédiments depuis plus d’un siècle, à cause de l’endiguement de la rive gauche, fut érodé jusqu’à une profondeur de quinze mètres environ ; sachant que l’énergie des plus fortes vagues se limite à cette profondeur.

Afin de récupérer cette surface, des ingénieurs eurent l’idée de reconstituer artificiellement, ce que le VAR n’apportait plus naturellement.

Différentes techniques furent utilisées à la fois, pour le transport et le compactage des matériaux, en provenance de la colline de CREMAT. Si le transport se passa bien, il n’en fut pas de même pour le compactage qui ne fit qu’ébranler et liquéfier la masse totale des remblais naturels et rapportés. De plus, il est fort possible que ce compactage (dit dynamique) eut pour effet, de créer un barrage souterrain contraignant la nappe phréatique à se mettre en charge et à engendrer peut-être, la catastrophe de 1979.

 

Mis à part ce triste épisode, bien d’autres soucis se firent jour après tous les aménagements réalisés sur le Fleuve.

Par exemple, causé par l’accélération des eaux, due à l’étranglement, un thalweg  s’est créé, où se précipitent toujours les quelques galets ayant échappé à tous les pièges (prélèvements, retenues, etc.).

Il est certain qu’aujourd’hui, plus aucun galet ne vient alimenter nos plages ; leurs surfaces diminuent à vue d’œil  à un point tel que les ouvrages environnants (routes, voies ferrées, ports etc..) sont en danger.

Par contre, une arrivée massive de sable est inquiétante. D’où provient-il ?

 

On sait que les matériaux mis en place sur le plateau naturel du Delta sont composés de pouding, lui-même étant un agglomérat de galets, de sable et de limons argileux, le tout étant aujourd’hui, assaisonné par les effluents des décharges et des stations d’épuration.

 

Toutes ces nouvelles matières deviennent une proie facile à attaquer et à déplacer, quand la mer est grosse par vent d’Est. Les galets eux, sont piégés par le thalweg nouvellement créé. Par contre, le sable et les limons happés et transportés par les fortes vagues et les courants, se déposent tout au long du littoral entre Saint-Laurent-du-Var et Antibes.

Si ce sable provient des remblais, cela voudrait dire que la plate-forme de l’aéroport  est en danger. Il y a donc lieu, à l’avenir, de remettre en question certaines techniques d’utilisation des sols, mais aussi la régularisation des cours d’eau à l’intérieur des terres par des barrages, des digues ou des retenues.

 

En résumé, en examinant une carte du bassin méditerranéen, on est frappé de constater l’absence d’aménagements tels que ports, aérodromes etc. sur les deltas des grands fleuves se jetant dans une mer sans marée."

 

Le 25 juillet 2004-

 

Le texte envoyé par M Duclos à l'ACL a été reproduit tel quel. Seule la présentation a été modifiée (espaces et caractères gras) afin de répondre aux contraintes nécessaires de présentation sur Internet.